• "Alcools" d'Apollinaire

    "Alcools" d'Apollinaire

    Les voyages, les amours, les déceptions d'Apollinaire lui inspirent ce recueil qui rompt avec l'art poétique traditionnel.

     

     

    Un recueil autobiographique

    "Alcools" est un recueil de poèmes écrits entre 1898 et 1913. En 1898, Guillaume Apollinaire - de son vrai nom Wilhem Apollinaris Kostrowitzky - a 18 ans et cherche encore sa voie ; en 1913, il en a 33 et est l'un des représentants de l'avant-garde. L'ensemble de ce livre contient tous les développements futurs de son œuvre.

    La moitié du recueil est née du séjour en Allemagne qu'il fit en tant que précepteur. La section intitulée "Rhénanes" restitue les impressions du jeune voyageur, alors épris de la gouvernante. Son amour déçu le conduit à fuir Paris où il écrit "La chanson du mal-aimé". Il y rencontre Jarry, Max Jacob, Vlaminck et fréquente le Bateau-Lavoir, atelier de Picasso. Il participe alors à cette esthétique nouvelle faite d'ironie, de féérie, exaltant le modernisme : Apollinaire écrit ainsi "Lul de Faltenin". En 1907, il rencontre Marie Laurencin dont il tombe amoureux. Il écrit alors "Le Brasier", "Les fiançailles"...

    Dès 1911 s'opère un retour à la prosodie traditionnelle : c'est sa période classique. Son emprisonnement dans l'affaire des statuettes se traduit par "A la santé". Mais c'est sa rupture avec Marie Laurencin qui le marquera le plus et inspirera "Le Pont Mirabeau", "Marie" et "Zone" qui, placé en tête d'"Alcools", est en même temps adieu à l'amour et au monde ancien.

     

    Le pluriel d'"Alcools"

    Le livre fit la gloire d'Apollinaire notamment par le scandale provoqué par la suppression de toute ponctuation. Pour le poète, "le rythme même et la coupe des vers voilà la véritable ponctuation et il n'est rien besoin d'une autre."

    "Alcools" permet d'appréhender tous les styles et influences littéraires d'Apollinaire. Les "Rhénanes" font preuve d'un romantisme discret et rattachent l'auteur à la tradition poétique française de Villon à Verlaine. Le reste du recueil privilégie imagination, irrationnel et jeux d'écritures. Dans "Zone" enfin transparaît l'influence cubiste et futuriste.

     

    La nouveauté de la forme poétique créée par Apollinaire est ce qui frappe en premier lieu : "Sa tentative pour tuer la littérature, arracher la poésie au lyrisme et mettre en forme de vers une suite de constatations remarquables par leur prosaïsme ou leur platitude, ressemble au jeu d'un mystificateur intelligent et habile qui se torture un peu l'imagination pour renouveler les arts et transformer les visions du monde." (Kleber Haedens, "Une histoire de la littérature française", Grasset).

    Cela va même jusqu'à mécontenter certains critiques : "Rien ne fait plus penser à une boutique de brocanteur que ce recueil de vers publié par M. Guillaume Apollinaire sous un titre à la fois simple et mystérieux : "Alcools". Je dis boutique de brocanteur parce qu'il est venu échouer dans ce taudis une foule d'objets hétéroclites dont certains ont de la valeur, mais dont aucun n'est le produit de l'industrie du marchand lui-même. C'est bien là une des caractéristiques de la brocante : elle revend, elle ne fabrique pas". (G. Duhamel, "Le dossier d'Alcools" - Pub. romanes et françaises, 1971)

    Mais avec "Alcools", le génie d'Apollinaire est reconnu. Il "lui suffisait d'écrire un poème pour que naissent des poèmes, de publier un livre comme "Alcools" pour que toute la poésie de son temps trouve son orientation." (Philippe Soupault, "Histoire des littératures", La Pléiade - Gallimard 1958)


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