• Existe-t-il une objectivité de la presse ?

    Existe-t-il une objectivité de la presse ?

    Oui : dans l’absolu, le journaliste devrait rendre compte des événements de manière objective.

    Non : mais son regard personnel et les contraintes de sa profession rendent son travail forcément subjectif.

     

     

    1ère partie : précision dans l’observation des faits, rigueur du raisonnement, souci d’analyse sont une nécessité journalistique. La presse a elle aussi les exigences de la connaissance et de l’objectivité scientifiques.


    Le journaliste travaille comme un chercheur.


    Le journaliste rationnel se soumet à la règle des 5 W : who, when, why, where, what (qui, quand, pourquoi, où, quoi). Son esprit critique exige de son travail vérité et objectivité. On peut rapprocher cette activité de celle du chercheur scientifique qui, lui aussi, observe et établit des rapports entre les faits.


    L’information passe avant l’opinion du journaliste.


    L’information est exigence de sobriété et de dépouillement. On trouve chez le journaliste objectif la volonté d’exclure de son discours tout ce qui est passionnel et subjectif. C’est pour satisfaire à ce désir d’objectivité que la presse s’est donné un style, une manière de rapporter les événements qui n’appartiennent qu’à elle. Il y a une écriture spécifique du journaliste, qui lui permet de dépasser sa subjectivité.


    Le savoir et la vérité exigent la liberté.


    Le souci de vérité et d’objectivité dans le discours ont pour conséquence la liberté, donc le refus de toute censure. En raison de l’objectivité, le fait est sacré : il faut donc le montrer, le dire, l’exprimer ; le journaliste n’a pas le droit de se taire, ni d’être réduit au silence. En raison de la liberté, la pluralité des opinions doit être garantie ; que les avis s’opposent est un bien, le débat étant la condition de la liberté d’expression.

     

    2ème partie : les événements et les faits que le journaliste doit traiter ne sont pas une réalité objective et scientifique. Il parle des hommes et il est un homme, il est donc subjectif.


    Le journaliste est par excellence l’homme de son temps.


    Le journaliste est un homme d’action et il a pour sujets les actions des hommes, qu’il ne peut analyser avec la rigueur de la démarche scientifique. Deux journalistes, confrontés au même événement, n’auront jamais la même réaction. Le choix même de l’événement, indépendamment de l’analyse et du commentaire, est déjà subjectif.


    Le temps est un obstacle à l’objectivité.


    Le journaliste est asservi à la rapidité du moment, à la succession d’événements toujours nouveaux et à la contrainte de plus en plus astreignante du « scoop ». Il est aussi un observateur qui n’a ni le temps ni les moyens de prendre du recul par rapport à la chose observée. Il est prisonnier de ce qui fait la modernité des techniques de communication ; obligé de réagir vite, il ne peut plus garantir une stricte objectivité.


    Le langage est forcément subjectif.


    Subjectif dans le choix de ses sujets, subjectif parce qu’il est un homme, subjectif parce qu’il a de moins en moins le temps de l’analyse, le journaliste est encore subjectif dans son langage. Qu’il s’agisse de presse écrite ou de presse télévisuelle, les mots et les images ne sont jamais neutres. Pour intéresser un lecteur ou un téléspectateur, il faut certes relater des événements, mais il faut aussi émouvoir, choquer, séduire ; il faut faire appel à l’intelligence et à la sensibilité, donc à la subjectivité.

     

    Conclusion


    Un article de presse ne sera jamais un rapport de comptabilité, « certifié exact ». Le fait brut (comme la dépêche d’agence), sans commentaire ni analyse, sans point de vue personnel, n’existe pas. « Un homme armé d’un pistolet mitrailleur a tué six personnes dans un supermarché » : tel est le fait brut, mais cela ne m’apprend rien. Je veux savoir « qui, où, comment, quand » et, surtout, « pourquoi ». Je demande donc au journaliste de me relater un fait, si possible dans un style qui m’accroche, puis de m’aider à comprendre la portée de cet événement. Je lui demande donc de l’objectivité, mais aussi de me faire partager ce qu’il a vu, approché, compris, donc de la subjectivité. La réponse à notre question ne peut être catégoriquement « oui » ou « non ». A ceux qui craignent de voir la subjectivité déformer la vérité, nous répondrons que le lecteur a, lui aussi, sa subjectivité et un sens critique, capables de contrebalancer ceux du journaliste.


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