• Les vins et les cépages

    Les vins et les cépages

    On dit du vin qu’il délie les langues parce qu’il rend bavards les buveurs, même si l’on fait peu de cas des propos d’ivrogne. On dit d’ailleurs d’un vin trop jeune qu’il peine à s’exprimer et d’un bon vin qu’il est éloquent. Autant de raisons de s’intéresser aux mots qui le caractérisent et aux expressions qu’il a inspirées, pour en savoir plus sur le monde des vins et des cépages et mieux en savourer la langue.

     

     

    I – L’origine du mot et son histoire

     

    Le mot vin vient du latin vinum, terme usité dès le début de la civilisation romaine pour désigner une boisson fermentée obtenue à partir du raisin. On l’emploie par analogie pour désigner des boissons fermentées avec le jus d’autres fruits. On connaît ainsi le vin de palme, le vin de canne et même, en Afrique, le vin de bananes, à ne pas confondre avec le vin d’oranges, qui est un vin dans lequel on a fait macérer des oranges, ou avec le vin de paille, élaboré à partir de raisins qui ont mûri sur de la paille.

    Les mots viticulteur et viticulture viennent d’un autre mot latin, vitis, qui désignait la vigne, tandis que vigneron et vignoble viennent du mot français vigne. Le cep de vigne a aussi une origine latine (cippus : le pieu) et a donné le mot cépage pour désigner la variété de vigne cultivée. Les mots savants qui s’appliquent à l’étude des vins, comme œnologie, viennent du mot grec oinos (vin), dont sont issus également œnométrie (mesure de la richesse des vins en alcool) et œnolisme (forme d’alcoolisme due à l’abus de vin).

    Les dérivés et composés sont nombreux. La vinasse, formée avec le suffixe péjoratif –asse, a d’abord été un vin assez aigre, avant de désigner un mauvais vin. Le vinage consiste aujourd’hui à viner, c’est-à-dire ajouter de l’alcool à un vin, mais ce verbe a eu autrefois des sens qui ont disparu (vendre du vin ou cultiver la vigne), et le vinage a qualifié un droit payé sur la récolte ou le transport du vin. La vinification est la fabrication du vin. Une personne avinée est imbibée de vin. Enfin le mot vinaigre a été composé à partir de vin et aigre pour désigner un condiment à base de vin. Le mot entre aussi dans la composition de l’esprit-de-vin (l’alcool éthylique), du pot-de-vin (un dessous de table illégal) et du taste-vin (la pipette ou la petite tasse d’argent qu’utilisent les dégustateurs de vin).

     

    II – Des goûts et des couleurs

     

    On distingue différentes sortes de vins en fonction de leur fabrication, de leur qualité ou de leurs caractéristiques. On parle de vin mousseux, rouge (produit avec des raisins dont on a conservé la pellicule), blanc (avec des raisins sans leur pellicule), rosé (résultat d’une vinification spécifique).

    Par ailleurs, dans la langue administrative et commerciale, on identifie les vins d’appellation d’origine contrôlée (A.O.C) à partir de la zone de production, du cépage, de la teneur en sucre (le moût) et en alcool, du rendement à l’hectare, des méthodes de culture, de vinification et de taille de la vigne. On distingue les vins de table – qui sont des vins de consommation courante –, des vins fins et des grands vins, provenant d’un cru célèbre. Attention cependant à ne pas confondre un grand cru et les vins du cru, autrement dit les vins du terroir qui ne sont pas toujours de grands vins, même s’il y a de fort bons vins de pays. Les mots qu’on emploie pour désigner un vin reflètent souvent la façon dont on le juge. Les vins médiocres seront qualifiés de piquette, et dans la langue populaire on appelle picrate un mauvais vin rouge.

    On fait aussi allusion à la couleur du vin rouge quand on parle de tache de lie-de-vin ou de tache de vin. Mais le mot désigne également une certaine quantité de vin qu’on boit en certaines occasions, comme le vin d’honneur, offert en l’honneur de quelqu’un, et qu’on avait d’abord appelé vin du coucher parce que cela correspondait au vin que les mariés offraient le soir de la noce pour qu’on les laisse tranquilles.

    D’autres expressions comportant le mot vin qualifient l’état d’ébriété dans lequel on peut se trouver si l’on en abuse : être entre deux vins, c’est être légèrement ivre, mais cuver son vin, c’est en avoir beaucoup trop bu ! On peut aussi mettre de l’eau dans son vin (se radoucir), mais quand le vin est tiré il faut le boire, déclare le proverbe, voulant dire par là qu’une fois engagé on ne peut plus reculer.

     

    III – Mots de connaisseur

     

    Si l’ivrogne boit du vin sans distinction, l’amateur savoure un vin dont il connaît le nom.

    Depuis l’Antiquité on nomme en effet les vins selon leur lieu d’origine, leur goût et leurs qualités. Certains sont entrés dans la légende comme le vin de Thrace, un vin grec dont Ulysse aurait énivré le cyclope Polyphème. D’autres sont entrés dans l’histoire comme le mamertin, vin romain produit près de Messine, que César choisit pour fêter sa troisième élection comme consul et que recommandait d’ailleurs le médecin Galien.

    Aujourd’hui on distingue les appellations selon les lieux (pays, régions, villages, châteaux) ou selon les cépages :

    • Un Gevrey-Chambertin ou un Saint-Estèphe rappellent leur commune d’origine.
    • Les côtes-du-rhône s’enracinent dans la zone qui borde le fleuve.
    • Un bordeaux, un bourgogne, un champagne correspondent à des vins produits dans le Bordelais, en Bourgogne ou en C’est pourquoi on a contesté les appellations de « champagne » californien et russe, comme celle de tokay, célèbre vin hongrois, empruntée par un cépage alsacien pour désigner un pinot gris. Par ailleurs, un chardonnay, un sylvaner nous renvoient à leur cépage.

    Ce sont les vignerons qui ont nommé les cépages cultivés dans leur région, en fonction souvent de leur origine, de l’aspect du feuillage ou de la forme des baies :

    • Le gamay, l’auxerrois, le chardonnay sont des noms géographiques. Des noms composés retracent la généalogie de certains croisements comme le rieslaner, obtenu avec un riesling et un sylvaner.
    • Le chasselas persillé doit son nom à sa feuille découpée comme une feuille de persil, le pinot meunier à l’aspect cotonneux de ses feuilles évoquant de la farine. Un pineau fait référence à la forme des grappes (par analogie avec une pomme de pin), une clairette à la couleur des baies, un fendant à leur consistance (le grain se fendant lorsqu’on le presse entre deux doigts), un muscadet ou un muscat à son parfum (rappelant la muscade).
    • La madeleine se nomme ainsi parce que le raisin dont il est issu arrive à maturité à la Sainte-Madeleine (le 22 juillet).

    On a aussi baptisé certains cépages en leur donnant le  nom de personnalités politiques ou militaires : queen victoria, duc d’Anjou, maréchal foch

    Il faudrait y ajouter les surnoms qu’on a donnés à ces cépages dans les vignobles où ils ont été successivement introduits… Il y a de quoi s’y perdre, d’autant qu’on trouve aussi des appellations publicitaires.

     

    Nul n’ignore que le vin peut être rouge, blanc ou rosé. Mais on sait moins que le Jura produit un vin jaune, le Portugal un vin vert et l’Algérie un vin gris. Ajoutons que le pinot noir est un des plus nobles cépages de Bourgogne et que des producteurs en quête de sensationnel ont inventé récemment un vin bleu !


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