• "Le Cheval d'orgueil" de Per Jakez Helias

    "Le Cheval d'orgueil" de Per Jakez Helias

    Un Breton raconte son enfance dans la société rurale du pays bigouden au début du XXe siècle.

     

     

    La vie des paysans bretons dans le pays bigouden

    Per Jakez Helias conte son enfance dans une famille de paysans de Pouldreuzic, une famille si pauvre qu’elle n’abritera jamais sous son toit aucun cheval, si ce n’est le cheval d’orgueil. Per Jakez fait l’apprentissage de la fierté auprès de ses deux grands-pères, le cantonnier et le sabotier, conteurs hors pair qui éveillent son imagination. Helias narre les travaux des champs, les jeux des enfants toujours à la recherche de ce qui pourra améliorer leur ordinaire de galettes et de lard. Très différente de celle des gens de la côte dont ils ne sont pourtant qu’à quelques lieues, la société des paysans bigoudens est cohérente et subtile. Mariages, naissances, deuils, pardon des saints font l’objet de coutumes soigneusement codifiées, qui visent à la fois de ne pas laisser place à la honte, « ar vez », et à ne pas blesser l’autre. Chacun doit tenir son rang. Cette cohésion est mise en cause par le grand brassage de la première guerre mondiale et par la mécanisation de l’agriculture. Apprenant son catéchisme en breton, Per Jakez fréquente l’école laïque, l’école « rouge », où le français est obligatoire sous peine d’une punition, la « vache ». Reçu au lycée de Quimper, futur agrégé, il ne participera plus que pendant les vacances aux travaux d’une société qui se rapproche de plus en plus du modèle français.

     

    Des mémoires traduits en français qui gardent la saveur de la langue bretonne

    Le Cheval d’orgueil est une chronique de la vie paysanne traitée sans idéalisation ni apitoiement excessifs. Ce qui frappe avant tout, c’est le courage, la fierté, la foi et la politesse de cœur de ces hommes, ces femmes, ces enfants. Une telle société ne peut que se dissoudre avec l’industrialisation et l’introduction du français. Ce qui donne justement leur saveur aux mémoires d’Helias, c’est qu’il les a écrits en breton avant de les traduire en français. Mille expressions laissant deviner l’originalité d’une langue qui a généré tant de conteurs.

     

    Parus en 1975 dans la sérieuse collection Terre Humaine de Plon, consacrée à des civilisations et des sociétés le plus souvent lointaines, les mémoires de Per Jakez Helias ont connu un succès phénoménal, se vendant à 1 500 000 exemplaires. La France, à l’apogée de sa croissance industrielle, était à la recherche de ses racines authentiques ; en Bretagne plus particulièrement, l’originalité de la culture était affirmée par des chanteurs comme Glennor, Alan Stivell ou les Triskell. Helias s’interroge à la fin de son livre sur le sens de ce mouvement qui conduit les jeunes Bretons à se retrouver dans des cercles de danse et de musique, les « bagadou » : « Le sommeil du volcan c’est la fête folklorique. Ne vous y fiez pas. Son réveil c’est le barrage des routes et la défenestration du sous-préfet » (Per Jakez Helias, Le Cheval d’orgueil, Plon, 1975).

     

    Dans cette peinture d’une société très fermée, tout à l’ouest de la Bretagne, des millions de lecteurs, dans et hors de l’Europe, se sont reconnus, le particulier touchant à l’universel : « C’est la chronique de trois cantons, c’est le livre d’un petit monde à la semblance – il faut le croire – du monde tout entier » (Charles Le Quintrec, Les Grandes Œuvres littéraires de Bretagne, Ouest France, 1978).

     

    Claude Chabrol réalisa en 1980 un film à partir du Cheval d’Orgueil.


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